MALUM ET BONUM Vapeurs mortelles

MALUM ET BONUM – Vapeurs mortelles
Il est des romans qui, sous les dehors du polar, révèlent peu à peu leur vraie nature : celle d’un miroir initiatique tendu à l’âme en quête. Malum et Bonum – Vapeurs mortelles, de Mario Maiolo et Michèle-Élisabeth Rochlin, appartient à cette catégorie d’ouvrages qui ne se lisent pas simplement, mais se traversent comme un rite, un passage, une alchimie du sens et du silence. Ce livre est le premier volume d’une trilogie, promesse de révélations à venir, mais déjà porteur en lui de puissants enseignements symboliques. Le lecteur entre par effraction, happé par un drame inaugural aux allures de mystère antique : deux corps nus, enlacés dans la mort, gisent dans un hammam, théâtre éphémère d’une scène à la fois charnelle et sacrée. Rébecca Le Clèves et son amant deviennent les premiers témoins d’une réalité qui vacille. Ce lieu, chargé de vapeur, de moiteur et d’invisible, devient la chambre initiatique d’où jaillira le destin d’Adeline Le Clèves, sœur de la défunte, et protagoniste d’une quête vertigineuse. Adeline, ancienne professeure de Lettres devenue propriétaire d’un club de sport, incarne la figure de l’âme en marche. À travers elle, nous sommes conviés à franchir les seuils successifs d’un monde où la surface trompe et le réel dissimule une architecture secrète. Ce n’est pas seulement une enquête qu’elle mène, mais une descente dans les arcanes de sa propre lignée, un dévoilement de ce que la mémoire familiale avait laissé dans l’ombre. L’assassinat de son père, sénateur, survenu deux ans plus tôt, hante les soubassements du récit comme une énigme non résolue, un hiéroglyphe encore scellé.
MALUM ET BONUM – Vapeurs mortelles
MALUM ET BONUM – Vapeurs mortelles
La galerie des personnages qui l’entourent forme une constellation symbolique. Salvo Camillèri, commandant de police, en est le contrepoint : gardien du seuil, figure tutélaire à la fois rigide et poreuse, il incarne l’ordre rationnel confronté à l’épaisseur du mystère. Pascale Aumières et Raphaël Garcia prolongent cette tension entre le visible et l’invisible, tandis que des figures plus ambiguës – Fabrice Rougion, Robin Desmond Elliot, Pierre-Yves Bayart – viennent troubler la clarté du récit, tel l’athanor de l’alchimiste où les matières se mélangent avant de se purifier. Mais c’est Adeline qui tient la clef. Elle est cette Apprentie qui, frappant à la porte du monde caché, accepte d’en franchir les degrés, quitte à perdre ses repères, son innocence, ses attaches. Chaque révélation est une épreuve, chaque rencontre une initiation. Le parcours qu’elle trace n’est pas linéaire, il est spiralé, fait de retours, de chutes et de renaissances. Il faut accepter de descendre pour comprendre. Il faut accueillir la douleur pour lire dans l’obscurité. La plume de Mario Maiolo, musicienne et précise, épouse celle de Michèle-Élisabeth Rochlin, poétesse et initiée, dont les symboles affleurent à chaque page, sans jamais verser dans l’explicite. L’écriture est dense, fluide, élégante, tissée d’ellipses et de respirations comme une marche rituelle dans un temple invisible. Le style, tout en retenue, laisse sourdre une tension presque mystique : celle du chercheur, du veilleur, du lecteur qui comprend qu’il ne lit pas un simple récit, mais qu’il est lui-même convoqué. La Franc-Maçonnerie affleure ici comme une mémoire souterraine, une structure d’âme. Jamais revendiquée, elle travaille la narration de l’intérieur : dans les figures, les gestes, les lieux, dans la présence d’un libraire ésotériste, dans l’écho des silences et jusque dans la figure animale du chat Napoléon, sphinx domestique veillant sur les seuils du non-dit. Le Mal et le Bien, Malum et Bonum, – selon la traduction littérale du latin – sont les deux pôles d’une tension alchimique, les forces contraires et complémentaires que l’initié doit apprendre à regarder face à face, non pour les juger, mais pour les unir. Ce ne sont pas des catégories morales figées, mais les matériaux mêmes de l’Œuvre à accomplir. Il ne s’agit pas ici de condamner, mais de transmuter. De traverser. L’ouvrage publié aux éditions Detrad aVs dans la collection « EnQuête Initiatique » dirigée par Didier Quiniou, s’inscrit dans une lignée précieuse, celle des récits où l’action est prétexte à l’éveil, où la narration devient un chemin vers la lumière, et où l’émotion rejoint la connaissance. Il est à la fois roman d’enquête, récit de filiation, cartographie du secret et méditation sur la mémoire, le deuil, et la possibilité de renaître en vérité. Mario Maiolo, interprète multilingue passionné par la langue française, apporte à l’ouvrage sa rigueur élégante, sa maîtrise du rythme et de l’équilibre narratif. Michèle-Élisabeth Rochlin, professeure de Lettres Classiques, membre de la Grande Loge Féminine de France, y insuffle une lumière discrète, mais constante : celle des symboles travaillés en silence, celle des traditions intérieures transmises à travers les mots. Malum et Bonum – Vapeurs mortelles est un livre qui se lit les sens éveillés et le cœur à l’écoute. Il murmure à qui veut bien l’entendre que derrière l’apparente complexité du monde se dissimule une architecture plus vaste, que chaque meurtre cache un mystère, et que la Vérité, pour advenir, exige que nous consentions à franchir les voiles. C’est un roman initiatique au sens le plus noble du terme : il ouvre, il élève, il trouble, et nous laisse sur le seuil, changés.
DETRAD
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MALUM ET BONUM – Vapeurs mortelles  Mario Maiolo – Michèle-élisabeth Rochlin DETRAD aVs, coll. EnQuête Initiatique, 2025, Tome 1, 246 pages, 18 €
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