À l’occasion du Salon du Livre et de la Culture de la Grande Loge de France,Jacques Ravenne, auteur du roman Les Ressuscités, sera présent le samedi 14 juin 2025 pour une conférence intitulée « Francs-Maçons, Templiers : l’héritage impossible ? », de 11h00 à 13h00, dans le Grand Temple Pierre Brossolette.
Blason Salon du Livre et de la Culture GLDFNous vous proposons ici une lecture de son dernier opus, où l’histoire, le mythe et l’initiatique se conjuguent dans un récit haletant aux multiples niveaux de lecture.
Dans les venelles obscures d’un Paris médiéval exhumé des brumes du temps, où les pavés suintent le sang des traîtres comme des saints, Jacques Ravenne érige avec Les Ressuscités un temple de fiction où chaque pierre semble chargée d’un symbolisme ancien. Ce roman est bien davantage qu’un thriller historique. C’est une œuvre de réintégration, une traversée initiatique aux confins du visible et de l’invisible, où l’Histoire devient allégorie, et le passé, miroir d’éternité.Les Ressuscités Ravenne
D’entrée, le lecteur est happé par une atmosphère dense, saturée de conspiration, de fer et de foi. Avril 1309, Paris retient son souffle. Le Châtelet, véritable matrice de douleurs, résonne des cris des Templiers suppliciés, dont la mémoire hante encore nos loges silencieuses. Leur agonie, orchestrée par l’implacable Guillaume de Nogaret, dépasse les supplices du corps : elle est le théâtre d’une guerre occulte entre la couronne et le sacré, entre le pouvoir profane et l’Ordre ancien. Au cœur de ce chaos circule une relique volée, fragment d’un secret antédiluvien, dont la quête attire convoitises et malédictions. Mais ce qui trouble l’ordre établi, c’est le murmure d’un impossible retour : des êtres donnés pour morts franchissent à nouveau les seuils du monde, porteurs d’une vérité ensevelie dans les plis du mythe et du rite.
Pour élucider ce mystère, Guillaume de Nogaret confie sa mission à un duo improbable : un ancien croisé devenu lame mercenaire, marqué par l’Orient et les ténèbres ; et une religieuse insurgée, dont la quête de lumière l’a conduite à défier ses vœux. Leur union, tout en contrastes, incarne l’androgyne alchimique, la réunion des principes, la polarité féconde de toute entreprise ésotérique. À travers leur périple, entre catacombes et cloîtres, cryptes et palais, c’est l’âme d’un monde en transition qui se dévoile – entre chute et rédemption, entre oubli et révélation.Jacques Ravenne n’est pas un romancier ordinaire. Franc-maçon du Rite français, fin connaisseur des arcanes symboliques comme de la critique génétique, il bâtit ses récits comme des cathédrales. Avec la rigueur de l’historien, le souffle du visionnaire, et la main de l’initié. Depuis 2005, son œuvre en tandem avec Éric Giacometti a redéfini le thriller ésotérique. Mais ici, il revient en solitaire à l’écriture du roman historique, et c’est comme s’il retrouvait la source… celle qui jaillit entre les colonnes, dans l’ombre du Temple, là où naissent les grandes quêtes.
Logo JC LattèsLe Paris de 1309, qu’il reconstitue avec une précision quasi médiumnique, n’est pas décor mais personnage : il respire, gémit, prophétise. Les lieux, du Châtelet aux bas-fonds, deviennent autant d’épreuves sur un chemin initiatique. Les Templiers, loin d’être de simples figures historiques, apparaissent comme des Veilleurs, des porteurs d’un feu sacré que l’on a voulu éteindre, mais qui renaît sous d’autres visages, dans d’autres gestes.
À travers cette fresque d’ombres et de lumières, Jacques Ravenne pose une question que tout maçon entend au fond de lui : peut-on véritablement tuer le sacré ? Peut-on faire taire le Verbe ? Les « ressuscités » du titre ne sont pas seulement des revenants ! Ils sont des porteurs de mémoire, des fragments vivants d’un ordre cosmique qu’on croyait dissous. Leurs pas résonnent comme un rappel. Ce qui fut vrai une fois l’est pour toujours, dès lors qu’il repose dans le cœur de l’initié.
Guillaume de Nogaret, figure d’une puissance trouble, incarne ce que la tradition nomme l’ombre nécessaire. Il est l’homme du pouvoir, de la raison instrumentale, de l’ordre temporel. Et pourtant, à travers sa lutte acharnée, se dessine le portrait d’un être dévoré par ce qu’il combat. Ravenne ne le juge pas : il l’explore. Il en fait un archétype de l’initié à rebours, celui qui œuvre sans le savoir à révéler la lumière par le contraste des ténèbres.
Jacques Ravenne, 2018Les Ressuscités est une parabole envoûtante, écrite pour celles et ceux qui savent voir au-delà des mots et entendre au creux du silence. Chaque page y est pierre gravée, chaque personnage, symbole en marche. Le récit évoque un temps où la parole était feu, où les serments liaient l’âme, où l’épreuve forgeait la vérité. Il nous rappelle que les secrets véritables, ceux qui transforment, ne sont jamais cachés : ils attendent simplement que nous soyons prêts à les recevoir.
En refermant ce roman, on n’a pas seulement terminé une histoire. On a traversé un miroir. Et ce que l’on y a vu, dans les regards des Templiers, dans les pas de la religieuse et de l’assassin, dans le tumulte de Paris, nous accompagne encore, comme un mot sacré que l’on aurait reconnu sans l’avoir jamais entendu. Jacques Ravenne, une fois encore, ne nous raconte pas. Il nous réveille.Les RessuscitésJacques Ravenne – JC Lattès, 2025, 304 pages, 20,90 € – Format Kindle 14,99 €