Dans Du Chaos à la Lumière – L’Ultime Voyage, Fernand Cafiero et Alain Desbrosse tissent une œuvre rare, à la fois poème cosmogonique, traité d’alchimie vivante, mythographie ésotérique et cantique de l’âme pèlerine. Ce livre, puissamment habité, n’est pas de ceux que l’on survole ; il exige de nous un engagement intérieur, une attention fervente, une disponibilité à l’ébranlement. Il faut l’aborder comme on entre dans un Temple : avec le cœur ouvert, l’esprit éveillé, et les pieds déchaussés du quotidien profane.
Du Chaos à la LumièreC’est un livre qui ne se donne pas ; il se reçoit. Il ne disserte pas ; il murmure, il psalmodie, il invoque. Nous ne sommes pas ici dans l’analyse d’un contenu mais dans la traversée d’un monde. Le Chaos n’est pas une théorie mais une nuit matricielle. La Lumière, pas un dogme mais un chant d’éveil. Et l’ultime voyage n’est autre que celui que chacun, tôt ou tard, entreprend au-dedans de soi.
Dès les premières pages, nous sommes saisis par la présence vibratoire d’un symbolisme riche, mais jamais figé. Les œuvres alchimiques, égrenées comme autant d’étapes d’un pèlerinage de l’âme –œuvre au noir, au blanc, au bleu, au vert, au jaune, au rouge, puis d’or et d’Aur– ne sont pas ici des séquences conceptuelles, mais des climats spirituels, des états de l’être, des saisons de l’âme. La rose, dans sa déclinaison chromatique, en devient le sceau vivant : de la rose noire, graine du désordre primordial, jusqu’à la rose d’Aur, sommet irradiant de l’Œuvre spirituelle, chaque teinte incarne une transmutation de la conscience.
Du Chaos à la Lumière, détailLe style, flamboyant et saturé de résonances symboliques, mêle l’hermétisme biblique aux pulsations de l’ancienne Égypte, les fulgurances cabalistiques aux palimpsestes médiévaux, les Tarots aux chapiteaux de Vézelay, les rose-croix à la rosée du matin. Nous marchons avec les auteurs sur les crêtes d’un langage que seuls les initiés peuvent pleinement percevoir – un langage d’avant les langues, où chaque mot est glyphe, chaque phrase une incantation.
L’ombre portée de la Tradition est omniprésente. L’architecture invisible du Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA) affleure à chaque détour du texte : le Cabinet de Réflexion, VITRIOL, les Sept Sceaux, les figures de Marie-Madeleine et de la Jérusalem céleste tissent une trame parallèle à celle de l’alchimie, comme deux visages d’un même Mystère. La Maçonnerie devient ici le miroir contemporain d’un parcours immémorial : celui de l’homme qui, ayant accepté de mourir à lui-même, s’élève vers sa dimension royale. Le Temple devient alors le laboratoire du Grand Œuvre.
Basilique Sainte-Marie-Madeleine, Vézelay
Et puis il y a Vézelay– non pas un lieu seulement, mais un centre énergétique, un sanctuaire des transfigurations. Là encore, les auteurs ne décrivent pas : ils convoquent. L’esprit de Vézelay surgit, dans les pierres, les vitraux, les voûtes, comme un écho de la Jérusalem céleste, où les chapiteaux sont des grimoires, et la crypte, un utérus sacré. Marie-Madeleine, figure christique et isiaque à la fois, se dresse au cœur de ce sanctuaire comme l’incarnation du mystère d’amour qui fonde toute transmutation.
Dès le commencement, un QR code nous permet d’accéder à la galerie d’illustrations en couleurs qui accompagne l’ouvrage. Ces œuvres vibrantes sont signées Flora Desbrosse, qui poursuit ici la quête iconographique entamée avec Être plutôt que paraître. Diplômée en histoire, fondatrice du Petit Atelier de Flo, passionnée de peinture et de dessin, Flora donne à voir les transmutations évoquées par les auteurs à travers un univers plastique subtil, mystérieux et lumineux.
Fernand Cafiero, Franc-Maçon aguerri, fêtant cette année ses 50 ans de pratique de l’Art Royal, écrivain initiatique, penseur de la verticalité, a construit une œuvre profondément enracinée dans la Tradition. Il n’écrit pas des livres : il trace des sentiers. Ancien cadre supérieur des télécommunications, acteur de la mise en place du GSM en France, il est aussi musicien symboliste. Depuis plus de cinquante ans, il multiplie les conférences et les textes sur l’ésotérisme, l’alchimie spirituelle, le symbolisme. Du Chaos à la Lumière – L’Ultime Voyage prolonge, dans une forme poétique et flamboyante, son opus précédent Être plutôt que paraître – Esse Quam Videri.
Alain Desbrosse, frère de plume et d’esprit, complète ce tandem alchimique par sa vision ésotérique et artistique. Ancien cadre supérieur de la fonction publique d’État, passionné de spiritualité depuis l’adolescence, il donne régulièrement des conférences et nourrit une réflexion symbolique profonde, nourrie par l’histoire, le sacré et l’Autre. Avec Fernand Cafiero, leur dialogue devient alliance, fusion, unité.
Jean-Laurent Turbet
Nous devons la préface à Jean-Laurent Turbet, qui reçut les bienfaits de l’initiation en 1992. Second Grand Maître Adjoint de la Grande Loge de France, historien des spiritualités et blogueur infatigable, il est également juriste et politologue, thérapeute et praticien des collectivités locales. Son regard conjugue la rigueur de l’analyse, l’amour du symbole et une fidélité indéfectible à l’idéal fraternel. Sa plume précède ici le texte avec la bienveillance d’un veilleur, offrant un viatique lumineux à ce voyage intérieur.
Il ne nous reste plus, en refermant cette œuvre, qu’à méditer cette leçon silencieuse : toute véritable initiation est une combustion. Elle exige que nous consentions à brûler, pour renaître. Ce livre est une flamme. Il éclaire, il consume et il console. À nous, désormais, de répondre à son appel.
Le Compas dans l’oeil, logoDu Chaos à la Lumière – L’ultime voyageFernand Cafiero, Alain Desbrosse, Flora DesbrosseLe compas dans l’œil, coll. La parole circule, 2025, 192 pages, 20 €