Dieu et la conscience maçonnique

Dieu et la conscience maçonnique
À l’heure où le tumulte des dogmes se heurte aux silences de la conscience, et où le vacarme du monde assourdit les appels de l’âme, Olivier Chebrou de Lespinats nous tend un fil d’or, un sillon tracé dans l’épaisseur du symbole, pour réapprendre à nommer Dieu sans l’enfermer, à l’approcher sans le circonscrire, à le construire sans le posséder. Dans cette méditation exigeante, où chaque phrase semble pesée comme une pierre sur le chantier d’un temple intérieur, l’auteur ne nous propose ni une définition, ni une certitude, mais une œuvre vivante – un chemin plus qu’un savoir.
Dieu et la conscience maçonnique
Dieu et la conscience maçonnique
Ce livre n’enseigne pas Dieu… il nous le fait travailler ! Rien ici n’est de l’ordre du discours convenu. Il ne s’agit pas d’une théologie révélée, ni d’un catéchisme revisité. Il s’agit d’un art de l’interrogation, d’une invitation à pénétrer ce que la tradition maçonnique désigne du nom discret de Grand Architecte de l’Univers. Non une entité toute-puissante et extérieure, mais un principe intime, un appel à l’ordre, à la beauté, à l’harmonie, que l’homme incarne, construit, élève – parfois en silence, parfois dans l’effort, mais toujours en conscience. Ainsi, l’œuvre creuse patiemment trois galeries profondes dans la roche de la pensée contemporaine. L’une, tournée vers l’histoire spirituelle et intellectuelle, nous confronte à la lente désagrégation des dogmes, au silence que Nietzsche nommait mort, et que d’autres nomment absence. Mais au cœur même de ce vide résonne une persistance : Dieu ne meurt pas tant qu’il est cherché. Il ne disparaît que là où nous cessons de bâtir. La seconde galerie s’ouvre sur l’intériorité – là où l’expérience du divin, plutôt que s’imposer, se découvre : non pas comme une extase mystique, mais comme une exigence de conscience. Le divin devient mouvement, tension, orientation de l’être. Enfin, la troisième galerie – sans doute la plus fraternelle – appelle à une théologie active, symbolique, partagée, non plus seulement une pensée de Dieu, mais une manière d’être au monde en sa lumière. Olivier Chebrou de Lespinats ne nous conduit pas dans une chapelle, mais dans un chantier. Le verbe ici n’est pas prière mais taille. Chaque concept – transcendance, ontologie, amour, temps, sens – est repris dans la forge de la pensée symbolique et initiatique. L’auteur interroge Spinoza, Kant, Bergson, Ruyer, Eliade, Proudhon ; il convoque les avancées de la physique contemporaine comme les vestiges de la gnose antique ; il fait dialoguer le mythe et la raison, la science et l’expérience, non pour les opposer, mais pour en révéler les noces secrètes. C’est dans cette alchimie que s’esquisse une théologie proprement maçonnique : ni dogmatique, ni relativiste, mais éthique, poétique, opérative. Ce Dieu qu’il nous donne à penser n’est pas celui que l’on adore, mais celui que l’on accomplit. Il est l’idéal qui nous élève, la Finalité qui donne forme, la Présence qui invite. Il ne se récite pas, il se construit, pierre à pierre, en nous et entre nous. Il est silence à écouter, mythe à interpréter, lumière à chercher. Il n’est pas ce que l’on croit, mais ce vers quoi tend toute croyance.
Olivier de Lespinats
Olivier de Lespinats
Lire ce livre, c’est entrer dans une Loge invisible, où le rituel devient réflexion, où le symbole devient acte. On y croise l’étoile flamboyante, non comme objet céleste, mais comme appel à devenir. On y découvre la parole perdue, non comme une formule oubliée, mais comme un questionnement à réapprendre. Et peut-être, à travers cette quête, comprend-on enfin que la Franc-Maçonnerie ne parle pas tant de Dieu que de l’homme en quête du divin – cet homme qui, dans la nuit des apparences, apprend à aimer l’ordre du monde sans jamais vouloir le dominer. Olivier Chebrou de Lespinats, en fin lettré, en frère discret, trace ici une voie lucide et fraternelle, humble et rigoureuse. Humaniste spiritualiste, il se consacre depuis près de quatre décennies à l’étude des rites, des traditions et des langages symboliques, avec une fidélité à l’essentiel qui confère à son œuvre une rare profondeur. Chevalier de l’esprit, décoré pour ses recherches sur l’histoire du cheval et de l’Ordre de Saint-Lazare, il explore avec la même exigence le champ du visible et celui de l’invisible, dans une démarche de transmission, fidèle à l’idéal de construction intérieure qu’il incarne.
Cépaduès
Cépaduès
Il ne nous dit pas ce qu’est Dieu. Il nous apprend à poser la question. À bâtir une théologie non plus révélée, mais révélatrice ; non plus imposée, mais consentie. Une théologie du symbole, du silence et de la lumière. Une théologie de la construction. Et c’est là, sans doute, que réside la plus haute leçon de ce livre. Dieu n’est pas un savoir. Il est une œuvre. Et cette œuvre est en nous. Dieu et la conscience maçonnique Olivier Chebrou de Lespinats – Cépaduès, coll. de Midi, 2025. 86 pages, 19 €  
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